• Suite et fin du Le PEUPLE des HALLES

    Coronavirus: la distribution, adaptée, d'aide alimentaire se poursuit -  Croix-Rouge de Belgique
    À cinq heures du matin, l’arrivée des routiers mettait les Halles en « état de siège ». Au lever du jour le marché s’achevait.

    Tout un petit peuple venait s’approvisionner puis laissait place aux camions des éboueurs, aux voitures de nettoiement et aux balayeurs.  

    Les Halles étaient le territoire vers lequel convergeait, tout au long de la nuit, les charrettes des maraîchers, les livraisons de viande acheminées depuis les gares, les camions des routiers et les guimbardes des maraîchers. Elles étaient au centre d’une circulation, d’un mouvement incessant et concurrentiel.
    L’ensemble des marchandises devait être livré, traité, et vendu avant le matin.
    La nuit était l’unité de temps du marché. On savait qu’au matin, Paris allait exiger place nette. Les livraisons des marchandises périssables devaient être faites le plus rapidement possible, au meilleur endroit, de sorte qu’elles soient vendues au meilleur prix. Il y avait donc concurrence pour avoir des « bonnes places ».

    Grattage d’une tête de cochon - Photo Paul Géniaux

    Pour le pavillon de la vente au détail, de la charcuterie et de la triperie, c’est au sous-sol, à partir de 2h du matin, que les ouvriers s’occupaient spécialement des têtes de moutons ou d’autres animaux. Le fraisier découpait la langue et les joues vendues aux charcutiers, puis le cabocheur brisait les têtes pour récupérer la cervelle vendue aux tripiers. 


    Le Marché des fromages mous
    Le marché en gros des beurres, œufs et fromages était réparti sur deux pavillons. Le n°10 était consacré uniquement à la vente en gros des beurres et œufs ; le pavillon n°12 accueillait surtout les fromages et la vente au détail des beurres, œufs, fromage ainsi que la vente en gros des huîtres.
    Les fromages frais ne s’acquittaient d’aucun droit d’octroi, tandis que les fromages secs étaient assujettis à la taxe. Il était également défendu de vendre à la coupe les fromages de Brie et les fromages frais. Ceux à pâte molle étaient vendus par colis (caisse), et le prix était établi par dizaine pour les fromages de Brie et de Montlhéry, par centaine pour les fromages de Livarot et du Mont-Dore, par 10 kg pour les fromages de Munster, Port-Salut… Les fromages secs comme le parmesan étaient vendus à la pièce. 

    Les conditions de travail y étaient physiquement très éprouvantes. Le bruit était permanent. Les porteurs travaillaient parfois encore à soixante-dix ans. Les travailleurs des Halles ne dormaient que très peu la nuit. Certains ne tenaient qu’avec de l’alcool et des amphétamines.  

    « Les Halles, c’était aussi une manière de vivre ! »
    Les Halles représentaient pour tous une possibilité de trouver du travail. Elles représentaient aussi une possibilité de vivre en marge, dans un monde, celui de la nuit, qui ne partageait pas toutes les normes du reste de la société. Ainsi, la possibilité de l’anonymat était-elle respectée pour les anciens repris de justice car il était de tradition, aux Halles, de ne pas poser de question sur le passé des gens. Aux Halles, la pratique des surnoms permettait à ceux qui étaient « mal vus », « emmerdés par la police » de vivre sans être inquiétés. S’il était parfois mal vu de travailler aux Halles, c’est parce que certains y cachaient des itinéraires douteux. Ceci concernait en particulier les « porteurs » qui étaient des travailleurs indépendants.
    Certains étaient ici depuis 30 ou 50 ans. Parfois ils y étaient nés, sans doute entre les choux et les roses.
    Plus ancienne était la date d’arrivée, plus grands étaient la fierté et le sentiment d’appartenance.  


    MIN Agen, Galerie d'autrefois

    Les forts avaient une fonction d’organisation du déchargement. Avant l’arrivée des « approvisionneurs », ils délimitent des surfaces de sol à la craie. Il n’y avait pas de place attitrée. La chaussée devenait ainsi le « Carreau ». On prenait le « métrage », et chaque mètre carré de sol avait ainsi son prix, devenant une surface de vente où les marchands déposaient leurs étalages de fruits et de légumes. Chaque nuit, les forts embauchaient des travailleurs comme « renforts » pour décharger les marchandises.
    Les manutentions se faisaient donc sous la surveillance des forts des halles.
    Les forts faisaient placer les voitures, percevaient les taxes et les "mètres". Ils déchargeaient les colis et les marchandises en provenance du chemin de fer. En réalité les forts regardaient travailler leurs "renforts" , souvent clochards, qu'ils avaient recrutés le temps d'une nuit.
    Les forts devaient aussi dresser les "tas" de denrées, là aussi ils se faisaient "aider" par des "tasseurs". Seuls les forts avaient le droit de sortir des marchandises des pavillons, toujours aidés par des auxiliaires. 



    Le marché déborde largement des pavillons et s'étend sur les trottoirs de toutes les rues environnantes - le carreau forain - et dans les boutiques des commissionnaires.
    Dès 11 heures du soir on se prépare, la vente commence généralement vers 4 heures du matin. Il y a la vente à l'amiable et la vente à la criée.
    La vente au détail succède à la vente en gros dans la matinée. Les clients arrivaient entre 4h et 10h (horaires d’été) pour les transactions qui débutaient à la cloche pour la vente à l’amiable, et à la criée. Les légumes étaient vendus en premier, puis les viandes, les plantes, les primeurs et les fleurs, le cresson et la marée.
    La vente sur le carreau commençait vers 8h pour les cultivateurs et approvisionneurs puis vers 10h pour les marchandes de légumes au petit tas. L’animation est à son comble vers les 2h du matin.
    Marchandes de soupe ou de café, balayeurs, participaient à cette effervescence.
    Dans les caves, se trouvait aussi un monde parallèle : lotisseurs-gaveurs, cabocheurs, pétrisseurs de beurres, mûrisseurs de bananes, ou compteurs mireurs d’œufs…  


    Le Carreau des Halles

    La superficie des pavillons restait insuffisante. Aussi, perpétuant un mode de fonctionnement en cours depuis le Moyen Âge, la vente officielle s’installait sur les trottoirs des rues alentour et sur les voies couvertes des pavillons avec un marquage au sol précis et réglementé : c’était le carreau des Halles, ouvert tous les jours de 3h à 8h (horaires d’été).
    Des emplacements y étaient notifiés et des taxes perçues par les agents de la préfecture de la Seine. La superficie du carreau variait suivant les saisons ; il était plus étendu au printemps et en été.
    Le carreau était décrit comme « l’annexe de la vente en gros des fruits et légumes et des produits du jardinage ». Il comprenait toutes les ventes en plein air des jardiniers-maraîchers, cultivateurs des environs de Paris ainsi que celles des horticulteurs-fleuristes.
    S’y ajoutaient les approvisionneurs apportant des marchandises dont ils étaient propriétaires (fleurs, fruits et légumes du midi et du centre de la France). 



    Une équipe de forts chargeait jusqu’à 1000 ou 2000 bœufs par nuit.
    Certains de ces hommes pesaient jusqu’à 140 kilos, et mangeaient d’énormes quantités de nourriture dans les bistrots alentours.
    « J’ai vu manger une calotte de tripes de trois kilos. Un autre pouvait manger jusqu’à cent huîtres en salade », racontait au début des années 1970 un ancien bistrotier.
    Ils avaient également souvent soif ... 



    Le « ventre de Paris » était un monde à l’identité affirmée. L’un de ses plus vieux quartiers a nourri la Capitale pendant dix siècles.
    Cette « ville dans la ville » était une agglomération de métiers, que l’on ne trouvait parfois qu’ici. On peut citer par exemple les Forts des Halles, les Tasseurs, les Gardeuses, les Cabocheurs, les Portefaix, ou les Verseurs de poissons.
    L’histoire de ce Peuple des Halles a pris fin en 1969, avec le déménagement de ses activités à Rungis ou à la Villette. Ce départ a entrainé la mort de tout un tissu économique qui gravitait autour de l’activité, principalement nocturne, des Halles de Paris.  

    Les conditions de travail y étaient physiquement très éprouvantes. Le bruit était permanent. Les porteurs travaillaient parfois encore à soixante-dix ans. Les travailleurs des Halles ne dormaient que très peu la nuit. Certains ne tenaient qu’avec de l’alcool et des amphétamines.  

     

    Merci de votre passage, bonne journée à vous tous ....

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 14 Janvier 2021 à 10:16

    Et je suis certain que les produits de qualité que l'on vendait ne venait certainement pas du Pérou ,du Chili, ou d'Afrique du Sud...Mddrrrrrr

    On mangeait du pâté de tête de porc,une cervelle d'agneau où de la tête de veau chère à Chirac.... La belle époque.

    Bon jeudi

      • Jeudi 14 Janvier 2021 à 10:24

        Oui ! la belle et bonne époque, que nous vivions .... aujourd hui bien differente, heureusement certains ont leurs potagers 

    2
    Jeudi 14 Janvier 2021 à 10:39

    bonjour Bérénice, 

    c'était une autre époque, maintenant on a du mal à faire des travaux physiques. 

    Passe une bonne journée, gros bisous

    Nadine

    GIFS ANIMÉS HIVER - MCreations

    3
    Jeudi 14 Janvier 2021 à 12:24

    Merci Bérénice pour cet article qui était super intéressant .

    Il est vrai que dans ce temps là on mangeait beaucoup plus sainement que maintenant , les produits étaient BIO 

    certainement encore mieux que le bio d'aujourd'hui . Les gens étaient costaud , il y avait une sélection à la naissance .

    Aujourd'hui beaucoup sont fatigués , avant même d'avoir travaillé ....... MDR 

    Bonne journée , chez nous c'est la pluie et la grisaille , nous resterons bien à l'abri et au chaud.

    Amitié de Bertille  

    4
    Jeudi 14 Janvier 2021 à 13:07

    onjour ma Bérénice

    On voyait parfois des gens de la haute venir à la sortie des grands cabarets avec bien souvent ne danseuse dans ces bars des halles où ils n'étaient pas connus, c'était cela aussi les halles. A la lecture de ton exposé, je evois certaines scènes , des bagarres presque pour une plce , les halles étaient quelque chose de spécial qui manque aujourd'hui.

    Bonne journée ma douce et gros bisous à vous deeux
    Méline

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    5
    Jeudi 14 Janvier 2021 à 16:25

    C'est sûr, c'était une ambiance très spéciale et certainement assez éprouvante. Par contre j'imagine les nuits pour le voisinage... camions, bruit incessant pendant la nuit entière... 

    En tout cas, perdu à jamais...

    Bisous et bonne soirée

    6
    Julia2019
    Jeudi 14 Janvier 2021 à 17:10
    De toute façons les gens ne se plaignaient jamais du bruit de jour comme de nuit,l'évolution a fait que les personnes sont devenuent froid et arrogant il ne pense qu'a leur petite personne et mange trop de viandes très belle article.A bientôt.
    7
    Vendredi 15 Janvier 2021 à 19:30

    Merci de toutes ces explications , des fois des métiers bizarre qui avaient tout leurs importances, bisous JL

      • Vendredi 15 Janvier 2021 à 19:54

        l importance pour toute l organisation, l un ne va pas sans l autre, ainsi de suite ....

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